Synopsis Dans son documentaire Camp Papillon, Guillaume Sylvestre nous montre un camp de vacances pas comme les autres. Depuis plusieurs décennies, l'équipe du Camp Papillon offre aux jeunes vivant avec un handicap l'occasion de participer à la vie de plein air dans un camp de vacances adapté et sécuritaire. La mission de l'équipe est simple : assurer le bonheur des campeurs en partageant avec eux « la magie du Camp Papillon ».
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L’été dernier, Guillaume Sylvestre s’est offert une immersion dans le chaos touchant du camp Papillon, la plus grande colonie de vacances pour personnes handicapées en Amérique du Nord. Avec délicatesse, le réalisateur nous invite à vivre les hauts et les bas d’un été pas comme les autres.
ISABELLE MORIN
LA PRESSE
Grimper un mur d’escalade ou faire du ski nautique malgré un lourd handicap physique, c’est le genre de défi que relèvent les campeurs du camp Papillon, à Saint-Alphonse-Rodriguez, dans Lanaudière. Ces expériences inoubliables, ils peuvent les vivre grâce au dévouement d’une cinquantaine de moniteurs âgés de 16 à 20 ans.
Le camp Papillon existe depuis 1938 afin d’offrir un répit aux parents d’enfants qui ont une déficience intellectuelle, un trouble du comportement ou un handicap physique — et, souvent, une combinaison des trois. Pour les campeurs, âgé de 5 à 84 ans, ce séjour est un rendez-vous très attendu.
Présenté en version intégrale aujourd’hui jusqu’à dimanche à la Cinémathèque québécoise, et sur les ondes d’AMI-télé le 9 juin, le docuréalité Camp Papillon, un été de rêve souhaite montrer une réalité souvent éludée.
« On est dans une société normative. On ne voit pas ces personnes handicapées ou qui ont une déficience intellectuelle. Les handicaps, ça fait peur aux gens », estime Guillaume Sylvestre, réalisateur de Camp Papillon, un été de rêve.
Avec ce long métrage, Guillaume Sylvestre, qui est à l’origine de Secondaire V et de Durs à cuire, s’attarde particulièrement aux jeunes employés dévoués, loin des clichés d’une génération repliée sur elle-même. « Ce qui m’a intéressé, c’est de voir tous ces moniteurs qui, 16 heures par jour, accompagnent les campeurs minute après minute en étant payés sous le salaire minimum », explique-t-il. Cet apprentissage à la dure s’accompagne de pleurs, de découragement, mais aussi de fous rires.
« Cette adaptation de jeune à jeune, c’est ce que les campeurs viennent chercher. Sinon, ils seraient dans un gros CHSLD avec des professionnels de la santé. Ils sont là pour avoir du plaisir, pas pour être contenus », souligne le réalisateur, qui compare cette belle folie à un sac de maïs soufflé. « Où que tu regardes, il y a un truc incroyable qui se passe. C’est comme un voyage sur une autre planète. Et quand tu en sors, tu trouves les gens ennuyants. »
Créer l’étincelle
Raphaëlle Bélanger, alias Colombine, a commencé à travailler au camp Papillon à l’âge de 14 ans, raconte-t-elle à l’écran. Elle y a trouvé sa voie et souhaite poursuivre sa formation en éducation spécialisée. Patiemment, elle encadre les jeunes moniteurs qui, sans formation professionnelle et peu d’expérience de vie, tentent tant bien que mal d’accompagner leurs campeurs.
Eva-Aude, alias Moustique, en est à son premier emploi, un travail qu’elle envisage plus accessible, pour une grande timide, que d’être vendeuse dans une boutique. Jumelée à Jules, campeur « difficile », elle apprend à la dure que la vie de moniteur n’est pas de tout repos. Ariane, alias Maowie, n’arrive pas à comprendre les besoins de Caroline, qui fait continuellement des crises. Josefa (Sunshine), quant à elle, se prend d’affection pour Patrice, dont le départ se fait dans les larmes. Avec eux, on vit les moments de découragement et d’impuissance, mais aussi ceux qui créent l’étincelle.
Le rythme de travail est soutenu. Il implique d’accompagner les campeurs dans toutes leurs activités, de les faire manger, de les changer, de les consoler ou encore de les bercer au coucher, selon les cas.
À l’embauche, les moniteurs reçoivent une formation, mais rien qui puisse les préparer à la réalité. Ces dernières années, le camp fait face à une pénurie de moniteurs, indique en entrevue sa directrice, Sandra Boijeot. Deux jours après l’arrivée des premiers campeurs, un moniteur sur cinq abandonne.
« Quand on embauche, on le dit en formation : ça vous prend la piqûre. Pour vivre la magie, il faut rester jusqu’au bout », ajoute-t-elle. La magie, c’est cette étincelle qui se produit sans avertissement, dans un geste spontané. « Ils ne nous donneront jamais une petite tape dans le dos, mais attache-toi à un regard, parce que parfois, il vaut cher. Ce sont toutes ces petites choses qui en valent la peine. »
« La magie Papillon, affirme encore Colombine dans le documentaire, c’est ce qu’on en fait. C’est aussi la fierté d’avoir réussi à se rendre jusqu’à la fin. » Et de pleurer, au bout de l’été, parce que c’est déjà fini.