Synopsis Présenté comme l'histoire d'un pneu tueur qui décide de venger son peuple, Rubber (tourné aux Etats-Unis et en anglais) s'avère bien plus riche que cette trame simplifiée. Parallèlement à l'explosive histoire de ce pneu psychopathe, on suit en effet un groupe de personnages qui regardent le film en même temps que nous. Mais eux se trouvent bloqués dans le désert, observent les aventures du pneu Robert avec des jumelles et peuvent entrer en interaction avec le film. Quentin Dupieux crée là un dispositif malicieux, qui décuple l'étrangeté comique de ce road-movie et approfondit son versant théorique.
Entre Guy Debord et Peter Watkins (on songe à Punishment Park), Rubber laisse entendre que la vision d'une brave série B court le risque d'empoisonner les spectateurs. Au fur et à mesure que la mort et les cadavres jonchent la route de Robert le pneu, le film ne cesse de jouer avec la notion d'illusion, décortiquant ce royaume du faux qu'est le cinéma.
Quentin Dupieux réussit son coup : les cadrages sont d'une élégance folle (signalons que le film a été tourné avec un appareil photo numérique, le Canon EOS 5D Mark II), le rythme distille une planante sérénité et la bande originale participe à l'ambiance décalée.
Pourtant, le doute subsiste quant aux réelles intentions de Rubber : s'agit-il d'un plaidoyer pour le non-sens et l'absurdité au cinéma, ou Quentin Dupieux montre-t-il au contraire qu'un film n'est jamais un geste gratuit (comme le suggère ironiquement le monologue d'introduction) ? Rubber laisse joliment planer le mystère...
Présenté au Festival de Cannes (2010)